26 septembre 2016 - 00:00
Une aidante naturelle au bord du gouffre
Par: Deux Rives
Aline Pagé a tout abandonné pour prendre soin de sa tante Noëlla. | Photo: TC Média – Stéphane Martin

Aline Pagé a tout abandonné pour prendre soin de sa tante Noëlla. | Photo: TC Média – Stéphane Martin

Ayant tout abandonné pour s’occuper de sa tante malade âgée de 100 ans, Aline Pagé est à deux doigts de s’engouffrer dans d’énormes problèmes financiers pour maintenir la qualité de vie de son aînée.

Par Stéphane Martin

Un rapport médical d’avril 2015 recommande que la centenaire soit sous surveillance permanente par les proches ou hébergée dans un centre de santé.

Cette dernière option n’était pas envisageable pour Aline Pagé qui a choisi de prendre sa tante centenaire sous son aile. « Elle a toujours été là pour nous quand nous étions jeunes. Il n’était pas question que je la place en foyer et que je laisse quelqu’un d’autre s’occuper d’elle ».

Cependant, elle était bien loin de se douter qu’une telle démarche allait lui engendrer d’énormes soucis financiers. Afin de passer tout son temps auprès de sa tante à Saint-Joseph-de-Sorel, elle a quitté son emploi d’adjointe administrative qu’elle occupait à Gatineau. Son employeur lui a remis une cessation d’emploi pour motif de « compassion », ce qui indique qu’une personne doit s’absenter temporairement de son travail pour prendre soin d’un membre de la famille souffrant d’une maladie grave qui risque de causer son décès au cours des 26 prochaines semaines. Or, ce n’est pas le cas de sa tante qui, malgré son âge avancé, n’est pas à l’article de la mort.

L’Assurance-emploi considère donc que Mme Pagé a quitté de façon volontaire son emploi et lui refuse ses prestations. La cause est présentement en appel. Selon la plaignante, ces dédales administratifs la laisseraient sans revenu depuis les cinq derniers mois.

Elle a tenté de se tourner vers l’aide sociale, mais elle déplore ces nouvelles démarches administratives qu’elle qualifie d’épuisantes.

« Je dois maintenant faire la preuve par un examen médical que l’état de santé de ma tante nécessite ma présence en tout temps. C’est toujours à recommencer. Pourtant, j’ai un mandat d’inaptitude qui dit tout ça et c’est signé par un juge. L’énergie que je mets dans les papiers, je ne l’ai plus pour prendre soin de moi », déplore l’aidante naturelle qui se dit épuisée et à bout de ressources.

Pas un cas isolé

Elle ne serait pas la seule dans cette situation. Outre certains crédits d’impôt, il n’existe aucune aide financière pour les gens qui choisissent de devenir un proche aidant.

« Il y a des gens qui choisissent de travailler à temps partiel, d’autres qui effectivement laissent leur travail et finissent par se retrouver sur l’aide sociale. Ça fait partie des revendications auprès de l’État. Il faudrait un programme gouvernemental, car les gens s’appauvrissent pour prendre soin de leurs proches », explique la coordonnatrice à l’Association des aidant(es) naturel(les) du Bas-Richelieu, Chantale Guérin.

L’Association offre principalement du répit et de la formation aux aidants naturels de la région. Mme Guérin rappelle l’importance d’être bien outillé. « C’est un don de soi. Il faut éviter de s’isoler et de s’épuiser. Lorsqu’on accepte cette responsabilité, on le fait au moment présent, mais les gens sont souvent atteints de maladies dégénératives. Quelques mois plus tard, la réalité n’est plus la même. On ne sait pas toujours à quoi s’attendre, mais les gens en ressortent grandis et avec le sentiment du devoir accompli », termine Mme Guérin.

Une politique qui aide les proches aidants

Le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) confirme qu’en dépit des crédits d’impôt disponibles pour les proches aidants, aucune autre aide fiscale n’est actuellement disponible.

« La Politique de soutien à domicile de 2003 marque un virage important pour les proches aidants et les familles, puisqu’elle reconnaît ces personnes comme des partenaires, des citoyens et des clients », nous écrit la porte-parole du MSSS, Émilie Lavoie.

Cette Politique implique que les proches aidants puissent recourir à des services de répit, de dépannage, de présence-surveillance ou de gardiennage; des services psychosociaux ainsi que des services d’appui aux tâches quotidiennes.

Un investissement de 10 M$ a été alloué par le MSSS de façon récurrente depuis 2007-2008 pour soutenir des projets de répit s’adressant aux proches aidants, comme l’Association des aidant(es) naturel(les) du Bas-Richelieu.

Le ministère de la Famille contribue également au Fonds de soutien aux proches aidants et à la Société de gestion pour le soutien aux proches aidants qui contribue financièrement des organismes dans ce domaine.

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