1 septembre 2017 - 00:00
Langage et récit crus
Par: Deux Rives
L’auteure de cette chronique, Rachel Gauthier, est une passionnée de lecture. Résidente de Sorel-Tracy, elle étudie présentement pour son baccalauréat en études littéraires – Littératures francophones et comparées à l’Université Laval. | Gracieuseté

L’auteure de cette chronique, Rachel Gauthier, est une passionnée de lecture. Résidente de Sorel-Tracy, elle étudie présentement pour son baccalauréat en études littéraires – Littératures francophones et comparées à l’Université Laval. | Gracieuseté

CRITIQUE LITTÉRAIRE. Cette année, Yoan Lavoie, de Sorel-Tracy, publie Infirmes. Une lecture réjouissante et hilarante. Comment cet auteur réussit-il à se démarquer de la masse littéraire? Deux mots : sincérité contrariante.

En résumé

Le lecteur retrouve Yoan, un étudiant en littérature, qui ne comprend pas le sens de sa vie. Son parcours n’est qu’une suite de débauches et d’échecs personnels. Il tente de comprendre ses problèmes et d’obtenir un diagnostic de TDAH. Pourtant, nouvelle embardée, Yoan s’embarque sans s’en rendre compte dans la vie de Martin, un handicapé physique antisocial, qui ne demande en réalité qu’un ami. Le personnage principal, hypocrite et égoïste, tombe dans cette aventure sans queue ni tête; celle de suivre et d’aider un handicapé en fauteuil roulant. Lui qui de sa « vie de chien n’[avait] jamais rien fait pour personne. »

Puis, peu à peu, une étrange amitié se crée et sans le vouloir Yoan écrit sur Martin. Un geste qui pèse de plus en plus sur son cœur. Le trahit-il?

Le spécimen

À travers l’œuvre, l’auteur joue sur l’image de ces inadaptés physiques et sociaux dont fait partie Martin. Il utilise une approche amusante qui pourtant met en lumière l’isolement que subissent les handicapés. Le récit transforme le personnage de Martin en être caricaturé. Effectivement, Yoan aime imager les gestes de son compagnon : « Martin mange comme une mouette. Vraiment. Il tire la bouchée de son ustensile, d’un coup sec, lève la tête, puis mastique par saccades. Bouche grande ouverte. En sapant. C’est par petits mouvements avant-arrière du cou, la tête en l’air et la pomme d’Adam saillante, que les aliments finissent par tomber dans le trou. »

Les roulades visuelles et langagières

L’auteur s’amuse avec les mots et les images. La forme du texte est particulière; les dialogues sont insérés directement dans les paragraphes sans préambule ni tiret, la destruction de la langue prend en charge l’émotion des personnages et le récit n’est qu’une saccade, pourtant fluide, des pensées de Yoan.

Pour finir, la pluralité du titre indique que l’infirmité ne se réduit pas à celle de Martin. En effet, selon l’épithète du roman, un être infirme se définit comme une personne : « faible, physiquement ou moralement ». Ces deux curieux compagnons partagent ainsi une vie sans sens et sans avenir. À quelle fin mènera cette impasse?

L’auteure de cette chronique est une passionnée de lecture. Résidente de Sorel-Tracy, elle étudie présentement pour son baccalauréat en études littéraires – Littératures francophones et comparées à l’Université Laval.

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