27 décembre 2018 - 09:53
Problème de dépendance
« C’est l’amour qui m’a sauvé la vie » – Myriam Lévesque
Par: Julie Lambert

L'ancienne toxicomane et résidente de Sorel-Tracy, Myriam Lévesque, espère que son fils Mathis ne tombera pas dans l'enfer de la drogue comme elle pendant son adolescence. Photo Julie Lambert | Les 2 Rives ©

Même si elle est maintenant sobre depuis plusieurs années, la résidente de Sorel-Tracy, Myriam Lévesque, est toujours aussi surprise d’avoir pu se sortir des méandres de la consommation de drogue. Cette dépendance a bien failli lui coûter la vie, mais c’est l’amour de son conjoint qui lui a permis de reprendre le droit chemin.

En 2010, Myriam Lévesque, alors âgée de 17 ans et à la dernière année de son secondaire, se réjouissait de sa majorité toute proche. À cette époque, elle est excitée par sa récente liberté grâce à sa voiture et ses responsabilités d’adulte.

« Je commençais à sortir avec un gars. C’était dont le fun, à cet âge-là, de me promener avec mon char et de pouvoir veiller. Je me sentais tellement libre, j’avais le droit de tout faire, raconte-t-elle. Je travaillais beaucoup, j’allais à l’école, mais un moment donné, il fallait que je dorme. C’est là que mon chum a sorti la petite pilule magique et que tout a commencé. »

Descente aux enfers

Si elle prenait une méthamphétamine, aussi connue sous le nom de speed, à l’occasion dans les premiers temps, Myriam Lévesque a rapidement consommé beaucoup plus. En l’espace de six mois, elle est passée d’une à deux pilules la fin de semaine jusqu’à une consommation quotidienne. En plus, elle a connu plusieurs problèmes personnels, dont une rupture, des dettes et la perte de son emploi pour avoir été sous l’influence de la drogue sur son lieu de travail.

«À la fin, je prenais six speed par jour, cinq jours par semaine. J’avais un emploi à temps plein et un autre à temps partiel. Je ne dormais plus. J’ai donc décidé d’aller avec quelque chose de plus fort, mais ça coûtait cher. Le trois quarts de mes paies passaient là-dedans. J’ai lâché l’école. Je me suis endettée énormément. Après mon travail, j’étais sur le point de perdre aussi mon loyer. J’étais rendue sur le pilote automatique. Je continuais même si mes comptes étaient dans le trou et ce n’était pas grave. On dirait que la drogue prenait toute la place pour moi », confie la jeune femme aujourd’hui âgée de 27 ans.

Une lumière à l’horizon

Très mal en point après deux entrées à l’hôpital pour des problèmes de santé en lien avec la drogue, Myriam Lévesque a renoué avec son premier amour de jeunesse rencontré lors de sa première année au secondaire. Elle habitait à Drummondville et lui à Sorel-Tracy. Cette relation a changé sa vie, avoue l’ex-consommatrice.

« J’ai failli faire des overdoses et même cela, ça ne me domptait pas. Il a vraiment fallu que mon conjoint me dise de me prendre en main. Ma famille avait tout essayé auparavant. Il m’a dit que c’était lui ou la drogue. Quand j’ai commencé à sortir avec lui, je mangeais à peine un repas pendant plusieurs jours. Je me tenais sur les murs pour ne pas tomber tellement je n’avais plus de forces. J’ai arrêté et j’en ai repris une fois, mais depuis octobre 2010, je suis à jeun. Ça n’a pas été une étape facile. Aujourd’hui, je me dis que je me suis bien replacée grâce à lui », confie la mère de famille.

Avec du recul, elle se demande comment elle a pu tomber aussi bas. Aujourd’hui, la légalisation de la marijuana la met en colère. Myriam Lévesque est horrifiée qu’une drogue soit maintenant accessible alors que la dépendance peut mener à de graves problèmes.

« Cela ne m’intéresse plus. Une fois que tu as sorti tout ce que tu avais dans ton organisme, ça ne te tente plus de retomber là-dedans. Ça m’a apporté quoi à part des problèmes? Si j’avais continué comme j’étais partie, je serais sûrement morte. Je vois ce que ça m’apporte maintenant de ne pas toucher à la drogue. J’ai un petit garçon en santé, j’ai un conjoint que j’aime et j’ai obtenu mon diplôme. J’ai 27 ans, j’ai la vie devant moi! », affirme-t-elle.

Hausse des demandes d’aide en dépendance dans la région

Depuis l’an dernier, les centres de réadaptation en dépendance de la Montérégie, incluant ceux de Sorel-Tracy, ont enregistré une hausse de demandes des personnes souffrant de cette problématique. Celle-ci serait attribuable à un nombre plus élevé des dépendances reliées à l’utilisation problématique d’Internet ainsi qu’à la consommation de drogues ou d’alcool.

Selon les données obtenues auprès du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de la Montérégie-Ouest, les services de réadaptation en dépendance à Sorel-Tracy ont enregistré près de 104* demandes de services depuis le début de l’année alors que pour l’année précédente, on en comptait 116 pour l’année au complet.

Les centres de réadaptation en dépendance de la Montérégie ont connu une hausse de demandes de service sur l’ensemble du territoire passant de 6072 en 2016-2017 à 6507 en 2017-2018. Les interventions individuelles ont aussi augmenté à 31 797 alors qu’elles se chiffraient à 30 593 l’année précédente.

« Nous nous attendons donc à une hausse significative du nombre de demandes de service pour l’année en cours. La raison est que depuis juin dernier, nous avons procédé au déploiement de points de services dans les centres de détention, dont à Sorel-Tracy. Une personne est présente deux jours à deux jours et demi par semaine pour répondre aux besoins. Cela a eu pour conséquence d’ajouter 39 demandes dans notre service », explique la chef de service dépendance 2e ligne de l’équipe de la Montérégie-Est, Anne-Renée Beaudoin.

Selon le directeur adjoint des programmes Santé mentale et Dépendance du CISSS de la Montérégie-Ouest, Martin Tétreault, cette hausse est également attribuable à la montée d’une nouvelle dépendance dans les dernières années, soit l’utilisation problématique d’Internet (cyberdépendance) ainsi que de la dépendance à la drogue et à l’alcool.

« L’alcool demeure la dépendance la plus répandue. On estime que 5 % de la population a une problématique de dépendance. On a commencé de plus en plus à voir des dépendances en lien avec les écrans dans nos services. Dans les dernières années, on a essayé de diversifier nos services afin d’atteindre plusieurs clientèles et on en a davantage », assure-t-il.

*Données compilées jusqu’au 14 décembre 2018. L’année financière est du 1er avril au 31 mars.

Demandes enregistrées au centre de réadaptation en dépendance de Sorel-Tracy

2018-2019*

Toxico (Alcool et autres drogues)

228

Jeu

19

Toxico et jeu

4

Total

251

*Données compilées par le CISSS jusqu’au 14 décembre 2018. L’année financière débute le 1er avril et se termine le 31 mars.

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