10 octobre 2017 - 00:00
« Leur aide m’a sauvé la vie » – Luc
Par: Julie Lambert
Luc s’en allait sur une pente glissante et il a cherché de l’aide pendant sa détresse. | Photo: TC Media – Julie Lambert

Luc s’en allait sur une pente glissante et il a cherché de l’aide pendant sa détresse. | Photo: TC Media – Julie Lambert

Des milliers d’hommes au Québec vivent des moments de détresse qui peuvent mener à un geste irréparable. Sans l’aide de l’organisme La Maison du Passeur, Luc* est passé près de s’enlever la vie après une période noire.

L’année 2016 n’aura pas été facile pour le père de famille. Une séparation avec sa conjointe après trois ans de vie commune et une garde partagée de son fils de deux ans l’ont poussé dans une spirale négative.

Il s’est retrouvé seul sans amis ni famille pour l’aider. Ce sont ses comportements envers son fils qui lui ont fait réaliser qu’il prenait le mauvais chemin, confie-t-il.

« Des fois, j’avais de la misère à parler, alors je pognais les nerfs quand il n’écoutait pas. Je le chicanais, je levais le ton jusqu’au jour où je l’ai chicané pour qu’il se couche et qu’il me vomisse dans les mains. Je me suis dit : non, il y a d’autres choses que ça. Je ne veux pas ça pour lui », raconte Luc.

Luc s’est retrouvé au CLSC où son travailleur social lui a parlé de La Maison du Passeur. Cet organisme offre des services d’aide pour les hommes en détresse, vivant des situations difficiles ou ayant des comportements violents.

Retour vers la lumière

Luc a fait quelques rencontres en privé, en groupe fermé et par la suite en groupe ouvert. Malgré cette aide, il ne réussissait pas à se reprendre en main, avoue-t-il.

« Un soir, ça n’allait pas. Les difficultés financières, l’isolement et tout. Je ne m’acceptais plus, je ne m’aimais plus. Je ne voyais plus de solution. Je parlais et mon intervenant m’a demandé : tu me suis tu à l’hôpital ou pas? Moi, ça finissait dans le parking ici [Maison du Passeur]. Tout était dans le char, tout était prêt. Je finissais la réunion et je terminais ça là », confie-t-il, des larmes dans la voix.

Le geste de son intervenant a été salutaire. Après un séjour en psychiatrie, ses idées noires sont parties. « J’ai repris ma vie en main et j’ai changé mes habitudes de vie. Là, tout va bien. J’ai même décidé de redonner au suivant en m’impliquant dans des organismes d’aide. Ça me fait plaisir de redonner quelque chose qui m’a été utile et qui m’a sauvé la vie », conclut-il.

*Nom fictif pour ne pas identifier sa famille.

Une chance de désamorcer les crises

Les intervenants de La Maison Le Passeur servent de remparts aux hommes en pleine crise pour les aider à ne pas commettre de gestes irréparables.

Le cas d’Hugo Fredette, accusé du meurtre non prémédité de sa conjointe, est un rappel que n’importe qui est capable du pire, se désole la coordonnatrice de la Maison Le Passeur, Louise Plante.

Son organisme est spécialisé pour prévenir les homicides, mais aussi les hommes vivant toutes sortes de problématiques comme la violence conjugale. Les intervenants rencontrent en groupe ouverts ou fermés une centaine d’hommes par année qui ont le profil de M. Fredette, soit d’un homme sans histoire, mais qui sont en crise.

« J’ai déjà eu un homme qui est arrivé ici en disant : je vais tuer quelqu’un. En général, quand les hommes demandent de l’aide, c’est parce qu’ils sont prêts. S’ils ne l’ont pas tout de suite, ils vont décrocher. Nos rencontres leur permettent de se rendre compte qu’ils ne sont pas seuls à vivre leur situation et de désamorcer la situation », explique l’intervenant psychosocial, Serge Hébert.

Un coup de main

Il faut miser sur l’éducation des jeunes garçons pour réussir à changer la situation en amont, soutien Mme Plante.

« On souhaite que de plus en plus, le petit garçon puisse avoir accès à cette aide quand il en a besoin plutôt que de refouler cette souffrance ou la douleur qu’il peut vivre. On pense que la difficulté des hommes, c’est qu’ils ont appris très jeunes à ne pas demander de l’aide, à se débrouiller tout seul et si ça va mal, de ne pas en parler pour en pas avoir l’air faible », s’attriste Mme Plante.

Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, a dévoilé en août une aide supplémentaire sur cinq ans de 31 M$ pour la santé et le bien-être des hommes.

Cette aide sera bienvenue, pense la coordonnatrice de l’organisme. Des actions pourront être mises en place pour faire connaître davantage l’organisme à la population, mais aussi pour faire de la sensibilisation par des activités dans le milieu.

« On ne sait pas combien cela va représenter pour nous, mais cela démontre une reconnaissance particulière de la demande d’aide des hommes et de l’importance d’y répondre le plus rapidement possible », conclut Mme Plante.

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